Karma (par ParisDude)

Rien n’était moins sûr…

Deux époques radicalement différentes. Deux jeunes Portugais. Deux inquisiteurs. Des jumeaux siamois (dans le sens anatomique, non pas géographique) dans le ventre de leur mère. Et en toile de fond, le karma qui prend sa vengeance de façon aussi inattendue que dramatique. Tels sont les ingrédients de ce court récit. Je ne révélerai pas davantage de détails car ce serait quasiment narrer toute cette étonnante histoire, que j’invite tout le monde à découvrir soi-même.

L’auteur Jean-Philippe Fresnoy n’est pas un inconnu pour les habitué•e•s de ce site car nous avons déjà présenté ces premiers romans dans nos illustres colonnes (Sangs-Mêlés, Prix du roman gay 2019 dans la catégorie « Saga gay », ainsi que Mâle d’Amour). Il a d’ailleurs dû prendre goût aux récompenses parce qu’il a à nouveau raflé le Prix du roman gay cette année, dans la catégorie « Roman court » cette fois-ci, et ce précisément – vous l’aurez deviné – avec le livre dont nous parlons aujourd’hui.

Karma, donc – une espèce de « conte moral », on pourrait dire, mais qui s’interdit de nous faire la morale et qui cache bien des péripéties dans ses seulement 27 pages. À vrai dire, mise à part une certaine spiritualité inspirée de la nature et la beauté (une hébétude contemplative esthétique, peut-être), je ne suis pas vraiment adepte de tout ce qui demande foi ou croyance. En grand sceptique, je n’adhère pas aux concepts de karma ou dharma, des mots que je n’emploierais que de façon ironique. J’accepte volontiers que d’autres voient (espèrent voir) plus de choses dans le monde que nous traversons en étoiles filantes, du moment qu’on n’exige pas que j’y souscrive.

Je vous raconte tout cela parce que de la spiritualité, on en trouve toujours dans les écrits de Jean-Philippe ; c’est probablement dans sa nature. Mais il ne la partage pas en prophète constipé de sa propre importance, fort heureusement. Pas du tout même. Il est écrivain, après tout, il est conteur, il invente des histoires, des trajectoires, des liens et causalités qui surprennent par leur richesse et justesse, comme dans l’histoire qui nous intéresse ici. Le karma qu’il nous fait découvrir fait penser à l’impératif catégorique kantien poussé à son paroxysme logique (traiter autrui comme on voudrait que l’on nous traite, car sinon attention au retour de bâton !), avec une différence essentielle – point d’ennui ici (sans être méchant, je soupçonne Kant avoir été tout sauf un gai luron ou un boute-en-train).

On ne s’ennuie donc jamais avec Jean-Philippe Fresnoy. Ses histoires foisonnent, partent dans des sens inattendus, au grand plaisir de votre humble serviteur – j’aime bien être pris au dépourvu. Karma n’échappe pas à cette règle, et j’en recommande la lecture. Par ailleurs, oui, je suis au courant – on ne « commande » pas les histoires comme on pourrait passer commander sur Amazon. Mais si je devrais trouver un petit, tout petit bémol à ajouter, c’est que je suis resté sur ma faim en ce qui concerne João et Luís (lisez le récit, vous comprendrez). J’entends par là que j’adorerais lire un roman dédié uniquement à eux deux. Donc, Jean-Philippe, je sais que tu es sur d’autres projets, mais une romance historique et tragique attendrait d’être écrite, là… à bon entendeur, salut !