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22 heures sur 24 (de ParisDude)

Synopsis

Paul, un jeune homme homosexuel, se fait surprendre avec son ami par un membre de sa famille. Rejeté, il commet une erreur qui le mène à la prison.

Dans ce roman polyphonique, les jeunes auteurs, tous lycéens à Bayonne, font entendre la voix de tous les protagonistes du drame qui se joue (le petit ami, la mère, le directeur de la prison, un compagnon de cellule et enfin Paul).

Les auteurs décrivent l’engrenage qui conduit un jeune homme à l’enfer de la prison et au suicide.

La sensibilité du texte mais aussi son réalisme ont stupéfié et ému Gabi MOUESCA, ancien Président de l’Observatoire International des Prisons, qui préface le texte. L’association LGBT Les Bascos-Arcolan a aussi tenu à écrire un avant-propos. Enfin, le journaliste Christophe HONDELATTE, très instruit de l’univers carcéral, a accepté de parrainer le livre.

Un livre bouleversant, dont la triple thématique (homophobie, prison, suicide) traitée par l’écriture déjà affirmée des jeunes auteurs, et le graphisme des deux illustrateurs, eux-mêmes lycéens, passionnera un très large public !

À noter : les droits d’auteurs seront intégralement reversés à l’Observatoire International des Prisons (OIP)

Notre avis

Au fond, ce n’est qu’une banale histoire, un de ces faits divers que nous voyons chaque jour au journal, qu’il soit imprimé ou télévisé, une triviale tragédie que nous notons avec effroi et des frissons peut-être pour l’oublier aussitôt – dès que nous nous concentrons sur le sujet suivant, en fait. Paul, un jeune homme – tout juste vient-il d’avoir vingt-deux ans – sort avec ses copains. Ils s’amusent, ils dansent, ils boivent plus que de raison. Ils savent qu’ils ne devraient pas conduire, mais ils se croient invincibles, éternels. Paul prend le volant. Il perd le contrôle, percute une autre voiture ; la conductrice d’en face : morte sur le coup ; le meilleur ami de Paul : mort sur le coup. Direction la police, garde à vue, puis incarcération dans la maison d’arrêt de Fresnes, en attentant le procès. Au bout d’un an, abandonné par tous, violenté, violé, Paul se donne la mort.

Oui, l’intrigue, narrée ainsi, froidement, succinctement, paraît anodine, sans intérêt. Il suffit pourtant que trois jeunes lycéens se penchent dessus et se l’approprient pour qu’elle prenne vie – une vie tranchante, douloureuse, percutante. L’histoire, banale au premier regard, m’a cueilli comme une douche glacée, comme un coup de poing tout droit dans le plexus solaire, comme une gifle opportune. Tellement nous sommes inondés de faits divers du même genre que nous finissons par oublier les vies qui se cachent derrière ces histoires, les personnes, les humains qui en sont touchés, frappés, affligés. Nous finissons par oublier de ressentir. Ces trois lycéens – nommons-les : Andoni Martiquet, Marie Monguillot, Amadine So – ont réussi leur pari. Ils m’ont réveillé, m’ont secoué, m’ont tiré des larmes, littéralement.

Et pourtant, la technique employée n’est pas nouvelle ni originale. Nos trois jeunes ont eu l’excellente idée, au lieu de narrer l’intrigue de façon linéaire et classique, de tourner autour du noyau dur – la nuit en boîte, l’alcool, l’insouciance des jeunes, l’accident, la prison, le suicide – en l’agrémentant petit à petit de détails. Ainsi surgit l’historique des faits, l’histoire de Paul surtout, les deux vues successivement par le prisme de plusieurs personnes. Matthieu d’abord, le petit copain de Paul, le jeune homme qui l’aimait d’un amour sincère mais qui a été trop lâche pour rester à ses côtés pendant cette épreuve qu’a constituée cette année en prison. La mère de Paul ensuite, elle qui, apprenant l’homosexualité de son fils, l’a rejeté, l’a chassé de chez elle, l’a ensuite renié, brisé, insulté pendant qu’il était enfermé. Le directeur du centre pénitentiaire de Fresnes aussi, qui, accablé par le poids de son poste et le manque criant de moyens, se sent désabusé, meurtri, blessé. Vient Mohammed, l’homme porté à la violence, le meurtrier, qui a partagé la cellule de Paul et qui l’a pris sous ses ailes, touché par la vulnérabilité naïve du jeune homme. La voix de Paul lui-même clôt ce récit, la voix d’un jeune homme épuisé, rongé par la culpabilité et le regret, écrasé par la mort de deux personnes dont il a été la cause, brisé par le sentiment d’être laissé tout seul par tous ceux par qui il se croyait aimé…

Sous la plume de ces trois auteurs, ils apparaissent enfin, ces humains dont ce fait divers a bouleversé la vie. Et la voix de ces trois auteurs est tellement forte, même s’ils restent constamment dans une retenue, une discrétion, une pudeur sans tape-à-l’œil ni voyeurisme, tellement remplie d’empathie que l’histoire qu’ils racontent avec une étonnante maturité et un savoir-faire que certain(e)s écrivain(e)s pourraient leur envier, m’a tout simplement foudroyé. Il n’y a rien de glauque, rien qui invite à s’apitoyer sur le sort des uns ou des autres, rien que des phrases cristallines, justes, bien senties. Surtout, aucun des différents récits n’est présenté avec un quelconque jugement de la part des auteurs. Le jugement, il est passé dès le début, c’est un jugement de loi, de tribunal (même si Paul attend toujours son procès, il a avoué, les preuves sont là, on sait pertinemment qu’il est coupable), un jugement d’état de droit comme il se doit. Les autres humains, en revanche, n’ont pas à porter un jugement. Tout ce qu’il leur reste, dans ce livre, c’est l’amertume, la tristesse, le deuil, l’incompréhension, la culpabilité de ne pas avoir été à la hauteur.

Il est rare qu’un livre aussi court – à peine une centaine de pages – et écrit par de si jeunes auteurs (désolé, Mesdemoiselles, le masculin l’emporte dans la grammaire française, mais je n’ai pas oublié que deux parmi vous sont des jeunes femmes) me fasse autant d’effet, mais je n’ai pas honte de dire que, oui, j’ai eu les yeux moites plus d’une fois. Avec quelle force vous avez tiré ce fait divers du domaine de l’ordinaire (hélas, les accidents et les suicides en prison le sont devenus) et en avez fait un livre extraordinaire ! Je suis vraiment… soufflé. À ne pas oublier aussi Solène Olagaray et Louis Castets, vos amis du lycée, qui ont agrémenté ce livre de fort jolis dessins.

Pour faire plus court pour mes lectrices et lecteurs : à lire absolument.

Infos

Auteur : Amandine So, Andoni Martiquet, Marie Monguillot
Titre : 22 heures sur 24
Illustrations : Louis Castets, Solène Olagaray
Publié par : Éditions Elea Bizi
Publié le : 1er mai 2020
Genre(s) : Roman
Pages : 100
Lu par : ParisDude
Sensualité : 0 flammes sur 5

Note

5 étoiles sur 5

Où acheter

Ce livre nous a été envoyé par l’éditeur pour que nous puissions vous livrer notre avis honnête et sincère.

Plus d’informations (articles de presse, etc.) sur le site de l’éditeur.
L’interview télé de Claire Deruy et Gabi Mouesca, ancien président de ‘l’Observatoire International des prisons, lors du salon de Sare 2020 est à voir ici: https://www.facebook.com/eleabizi/posts/1440057402870302

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