Comme vous le savez, la rubrique Paroles des autres a toujours été ouverte aux annonces de tout genre (promotions, sorties, prix littéraires, événements), mais pas que… Nous sommes également heureux de pouvoir vous offrir des aperçus du monde de la création, de l’écriture, de la genèse des romans dont nous parlons ici. Pour ce faire, la façon la plus naturelle, la plus plaisante, la plus intéressante aussi, est probablement l’exercice de l’interview.
De ce fait, nous sommes ravis de pouvoir publier aujourd’hui une de ces interviews, à savoir celle menée entre notre chroniqueur Christophe, dont vous avez pu découvrir ces derniers mois bon nombre de retours de lecture, et Dominique Faure, qui non seulement participe également à étoffer ce site de chroniques, mais s’est surtout fait•e un nom en tant qu’écrivain•e. Nous avons déjà présenté nos fiches de lecture sur certains de ses romans (vous les trouverez ici, ici, ici et ici).
Sans plus attendre, voici donc cet entretien.
Christophe : Dominique, vous avez écrit quelques romans très différents, et vous êtes passée d’un registre résolument burlesque (avec les deux Virées) à une exploration psychologique de personnages gays dont vous narrez une partie de la vie. Comment expliquez-vous cette évolution ?
Dominique : Tout d’abord, je vous remercie beaucoup, cher Christophe, de me proposer cet interview dont vous avez concocté des questions auxquelles je vais me faire un plaisir de répondre…
Il m’est très agréable de pouvoir écrire dans des registres très différents, voire opposés. J’aime émouvoir – par-dessus tout peut-être – et j’aime aussi amuser et faire rire. C’est si bon de rire ! Il ne s’agit donc pas d’une évolution mais de deux façons d’exprimer ce que j’aimerais transmettre au lecteur – ou à l’auditeur, car je lis tous mes romans pour leurs versions audiolivres.
Christophe : Diriez-vous que les deux tomes de Frédéric sont votre ouvrage-clé ?
Dominique : Je crois que oui. Ce sont en tout cas les livres qui me tiennent le plus à cœur, pour les thèmes qui les jalonnent, et pour les personnages qui les illustrent, François le narrateur, et Frédéric le musicien.
François tient beaucoup de moi, c’est mon « double masculin ». Quant à Frédéric, c’est un personnage imaginaire qui m’accompagne depuis plus d’un demi-siècle. D’où vient-il ? Je ne sais pas. On ne peut pas tout expliquer…
Christophe : Comment approchez-vous le travail du style ? Quelle est la part de spontanéité dans votre manière d’écrire, et quelle est la part de recherche ?
Dominique : J’écris spontanément, dans mes divers styles. Les mots, les phrases viennent le plus souvent d’eux-mêmes – ou de je ne sais où ! J’écris toujours à la main (à l’ancienne !), l’après-midi ou le soir, un chapitre le plus souvent (ils sont courts, quelques pages), puis dans la même journée je saisis mon texte sur l’ordinateur. C’est alors que je procède à quelques changements, mais minimes. Je fais surtout la chasse aux « mots préférés », ceux que j’emploie souvent, en veillant à ce qu’ils ne se répètent pas dans la même page, voire dans le même chapitre pour ceux qui sont les plus visibles.
Cependant, lorsqu’il me vient une phrase qui me plaît, où que je me trouve, je la note, sinon elle est aussitôt oubliée, y compris la nuit lorsque je me réveille. Puis, je m’en sers à l’occasion. Il arrive aussi qu’une seule phrase amène toute une scène à mon imagination qui donne ensuite lieu à tout un chapitre !
Christophe : L’amour exclusif et absolu de François pour Frédéric correspond-il pour vous à une forme d’idéal dans une relation de couple ?
Dominique : OUI ! Je reconnais qu’une telle relation est rare, mais je connais plusieurs couples dont l’amour est « infini »… La relation entre François et Frédéric est pour moi absolument idéale. Si je n’ai pu la connaître dans la vraie vie, je l’éprouve en écrivant, en étant François, et c’est un vrai bonheur, peut-être aussi ce qui m’incline à l’écrire.
Christophe : Vos récits comportent des éléments autobiographiques. Pourriez-vous donner à vos lecteurs des exemples de ces éléments auxquels vous tenez particulièrement ?
Dominique : Dans chacun de mes romans « sérieux », il y a une part autobiographique… Peut-être davantage encore dans le dernier, Frédéric – Un amour infini, où j’ai prêté à deux personnages des expériences fâcheuses qui me sont arrivées dans l’enfance et dans l’adolescence. Ainsi, le récit de Frédéric qui relate une rencontre très effrayante dans le souterrain qui permet de traverser une grande avenue. De même, celui de Camélia à François lorsqu’elle lui confie pourquoi elle n’a plus jamais dansé alors que c’était sa passion. Peut-être est-ce pour moi un peu libératoire, ou en tout cas représente un besoin de dénoncer les violences, que je les ai vécues personnellement ou non, comme le viol de Frédéric dans son lycée.
Christophe : Auriez-vous pu (ou mieux encore pour nous, lecteurs, pourriez-vous) écrire une histoire d’amour entre hommes drôle et résolument décalée ?
Dominique : Je ne crois pas… peut-être l’amour est-il pour moi chose trop sérieuse…
Christophe : Avez-vous songé un jour à écrire une histoire d’amour exclusif entre une femme et un homme ?
Dominique : Je dois dire que… non. Le sujet ne m’inspire vraiment que s’il s’agit de François et de Frédéric !
Christophe : Vous avez fait une version audio pour tous vos romans. Comment avez-vous travaillé ?
Dominique : J’aime beaucoup et depuis toujours l’audio. J’aime jouer aussi de ma voix, la mettre au service de mes personnages en la transformant pour mieux les incarner, les faire vivre.
J’ai ainsi créé les audiolivres de tous mes romans et, pour le dernier, je l’ai agrémenté de musiques interprétées au piano par mes amis musiciens. La musique sur la voix, ce peut être très émouvant… et j’aime émouvoir ! Il y a quatre ans, mon éditrice m’a demandé d’inaugurer et de diriger une Collection Audiolivres pour sa maison d’édition, ce que je fais avec bonheur ! Ainsi, ai-je le plaisir de lire – je dirais plutôt d’interpréter – aussi les textes de mes amis auteurs, d’incarner d’autres personnages que les miens.
Pour ce faire, je m’installe au salon le soir tard, pour éviter les bruits du dehors, et je m’enregistre en continu pendant une demi-heure, reprenant sans couper les phrases que je n’ai pas dites exactement comme je le voulais, Puis je « traite » mon fichier-son, ce qui est un travail long, très minutieux mais agréable, pour faire le tri dans mes différentes « reprises » et conserver le meilleur, pour que la voix, l’intention, les silences, le souffle, portent le texte le mieux possible, sans qu’il y ait de « scories » (des S trop sifflants, des P trop plosifs, des R trop râpeux, des LL trop « mouillés », et bien d’autres choses !). J’aime aussi faire une sorte de « direction artistique » pour les auteurs qui souhaitent lire eux-mêmes leur œuvre. C’est très gratifiant !
Je pense aujourd’hui que l’audiolivre de Frédéric – Un amour infini, avec la musique qui s’ajoute délicatement à la voix, est vraiment ce que j’ai fait de mieux, ce qui me satisfait le plus, ce qui me tient le plus à cœur ! J’envisage d’ailleurs de refaire une version du tome 1, Frédéric – Instants de grâce, en ajoutant de la musique !
Christophe : Plusieurs de vos romans ont été chroniqués sur le blog de Dieter, avec d’excellentes notes. Merci, Dominique, d’avoir répondu à mes questions avec autant de spontanéité !
Dominique : C’est moi, cher Christophe qui vous remercie d’avoir eu l’initiative de cet interview pour le blog de notre ami et de l’avoir si bien mené !
Sur l’auteur
Dominique Faure aime porter un prénom qui mêle les genres. Un Doctorat-ès-lettres témoigne de son goût pour l’écriture. L’enregistrement de sa voix, prêtée à ses personnages (audiobooks), la musique, le pastel animalier et la création de logiciels pédagogiques non scolaires contribuent à embellir sa vie.
Ses romans
Une virée à Castel-Les-Eaux : Une (autre) enquête de Maxime Terrier
Une virée chez les Ducs : Une aventure de Maxime Terrier
Tous ces ouvrages peuvent également être achetés directement chez l’éditeur.
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Merci beaucoup, cher Dieter, d’avoir publié ce bel échange avec Christophe, si talentueux et sympathique chroniqueur sur Livres Gay !